Les mains d’Azzedine Alaïa qui drapent une robe de Madeleine Vionnet
Actualité

Le Palais Galliera fait le portrait d’Azzedine Alaïa en collectionneur

Publié le 23 novembre 2023

Il est l’un des plus grands couturiers français des XXème et XXIème siècle. En 2013, le Palais Galliera consacrait à Azzedine Alaïa (1935-2017) une rétrospective riche de 70 pièces iconiques, offrant au public parisien l’occasion d’observer de près la virtuosité de ses coupes.

Dix ans plus tard, l’institution met en lumière son exceptionnelle collection de créations de mode, au nombre de 20 000 et signées Cristóbal Balenciaga, Gabrielle Chanel ou Elsa Schiaparelli.

Dans cette exposition, ce sont près de 140 de ces pièces que vous pourrez découvrir. En avant-goût de l’exposition, découvrez ci-dessous six d’entre elles…

D’abord : pourquoi collectionner ?

expo alaïa

(c) Gautier Deblonde

Une collection riche de 20 000 pièces ne témoigne pas d’un simple passe-temps. Pour Azzedine Alaïa, créateur de mode né à Tunis, venu à Paris dès la fin des années 50 pour devenir rapidement l’un des plus grands noms de la couture française, elle raconte une véritable passion, l’obsession nourricière d’un génie.

Une telle collection dit aussi un intérêt profond pour ses contemporains, doublé d’une phénoménale entreprise de mémoire. « Depuis de nombreuses années, a-t-il ainsi expliqué, j’achète et je reçois les robes, les manteaux, les vestes qui témoignent de la grande histoire de la mode. C’est devenu chez moi une attitude corporative de les préserver, une marque de solidarité à l’égard de celles et ceux qui, avant moi, ont eu le plaisir et l’exigence du ciseau. C’est un hommage de ma part à tous les métiers et à toutes les idées que ces vêtements manifestent. »

Cristóbal Balenciaga, le déclencheur

Cristobal Balenciaga, robe de cocktail, printemps-été 1960

Cristobal Balenciaga, robe de cocktail, printemps-été 1960 © Patricia Schwoerer / rgmparis

En 1968, le couturier espagnol Cristóbal Balenciaga (1895-1972), installé à Paris depuis trente-et-un ans mais se sentant en décalage avec les mutations de l’industrie du prêt-à-porter, décide de fermer sa maison de mode. Pièces et tissus sont alors menacés de disparition… Mais Azzedine Alaïa reçoit de sa directrice Mademoiselle Renée, la proposition de récupérer certaines d’entre elles. Le jeune couturier saute sur l’occasion, soucieux d’en préserver la mémoire. Et débute ainsi sa collection ! 

Madeleine Vionnet, l’exposition à Marseille

Madeleine Vionnet, Robe et cape du soir, 1937

Madeleine Vionnet, Robe et cape du soir, 1937 © Patricia Schwoerer / rgmparis

Couturière célèbre des années 1920 et 1930, Madeleine Vionnet (1876-1975) a bien failli voir son nom disparaître dans les brumes de l’Histoire… Jusqu’à ce qu’Azzedine Alaïa, qui admirait sa grande technicité, pose en 1984 avec l’une de ses robes dans le magazine Jardin des modes, puis initie en 1991 la première grande rétrospective dédiée à Madeleine Vionnet à Marseille.

De grands noms… du XIXème siècle !

Redfern, corsage et jupe, vers 1890-1900

Redfern, corsage et jupe, vers 1890-1900 © Patricia Schwoerer / rgmparis

Alaïa ne s’est pas contenté de s’intéresser aux couturiers du XXème siècle, loin de là. Collectionneur chevronné, il a vite souhaité que l’ensemble de pièces rassemblées au fil des années reflète la richesse de l’histoire de la mode. Avec, notamment, des créateurs du XIXème siècle, tels que Charles Frederick Worth (1825-1895), qui a inventé le principe du défilé de mode et eu l’idée de collections saisonnières, Jacques Doucet (1853-1929), lui-même un grand collectionneur, ou John Redfern (1853-1929), auteur de tailleurs de sport précurseurs.

Jeanne Lanvin, d’inspirantes robes du soir

Jeanne Lanvin, robe du soir, haute couture, vers 1935

Jeanne Lanvin, robe du soir, haute couture, vers 1935 © Patricia Schwoerer / rgmparis

Parmi les grands noms de la collection d’Azzedine Alaïa, celui de Jeanne Lanvin (1867-1946) est l’un des mieux représentés avec plusieurs centaines de modèles collectionnés au fil des ans. Le couturier admirait sans réserve la sobriété élégante de ses robes du soir, amples à la façon de jupes du XVIIIème siècle dans les années 1910 et 1920, puis majestueuses dans les années 1930… telle cette robe du soir noire, dont la grâce savante met en valeur le dos à la façon d’un bijou précieux.

Comme des garçons, rester dans l’air du temps

Comme des Garçons, robe, prêt-à-porter printemps-été 2014

Comme des Garçons, robe, prêt-à-porter printemps-été 2014 © Patricia Schwoerer / rgmparis

La collection d’Azzedine Alaïa s’enrichit à partir des années 1980 de pièces de ses contemporains, telle cette robe de 2014. Signée de la maison japonaise Comme des garçons créée en 1969 par Rei Kawakubo (née en 1942), celle-ci apparaît emblématique du goût d’Alaïa pour les créateurs nippons, tels qu’Issey Miyake (1938-2022) ou Yohji Yamamoto (né en 1943).

La surprise de l’exposition : Henri Matisse

Henri Matisse, costume de scène pour les Ballets russes

Henri Matisse, costume de scène pour les Ballets russes, première représentation donnée le 2 février 1920. Salle Matisse du Musée d'Art Moderne de Paris © Daniele Rocco

Rendez-vous à trois minutes à pied du Palais Galliera pour finir le parcours de l’exposition au musée d’Art moderne de Paris, qui expose trois costumes de l’artiste Henri Matisse (1869-1954). Ceux-ci datent de 1919 : ils ont été créés pour Le Chant du Rossignol, ballet de Serge Diaguilev inspiré d’un conte d’Andersen sur une musique d’Igor Stravinsky, et témoignent de l’intérêt d’Alaïa pour les grands artistes de la modernité, comme pour leurs expérimentations les plus audacieuses…

Informations pratiques

Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris

10 Avenue Pierre Ier de Serbie, 75116 Paris 16e

Tél : 01 56 52 86 00

Horaires 

Ouvert de 10 à 18h du mardi au dimanche

Nocturne les jeudis jusqu’à 21h

Tarifs :

Billet couplé avec « La mode en mouvement »

Tarif plein : 15 €

Tarif réduit : 13 €

Gratuit pour les -18 ans